Pour tout dire, ce que je découvre sous le stratifié polyester est accablant pour ce vieux pointu construit en 1946 !
Dans les années 70 les pointus font connaissance avec la plastification, ce procédé "miracle" qui consiste à recouvrir la coque extérieure d'une bonne couche de fibres de verre avec matrice polyester va épargner les travaux récurants de calfatage ; pour cela on sortait le bateau afin de le sécher superficiellement pour appliquer immédiatement par dessus le stratifié polyester... Seulement voilà, le bois ça travaille !
Au départ quand nous achetons l'Artesien, j'ai bien l'intention de le restaurer dans les règles de l'art, avec bois calfaté et tutti quanti ; c'est lorsque j'ai enlevé la couche de verre / polyester que j'ai mesuré l'étendue des dégats dont voici l'inventaire :
- Les planches de bordé au niveau de l'étrave sont intérompues au niveau de la première allonge à tribord et babord, ils avaient simplement ajouté des morceaux jointifs puis recouvert le tout en stratifiant. (voir photos plus bas)
- Les varangues sont presque toute cisaillées, sans doute par effet de séchage du bois contraint par le stratifié
- La quille présente une flèche de 5 cm due au long et mauvais stockage du bateau sur 2 pauvres aglos mal répartis, l'avant et l'arrière sont affaissés.
- C'est tout pour les dégats mais c'est dejà pas mal.
- Pour les points positifs, le bois est sain et les lignes du bateau sont belles !
Conclusion, il faudrait changer une partie du bordé pour lui redonner sa structure longitudinale puis il faudrait remplacer les varangues, etc. Autrement dit tout refaire ou tout jeter !
You get what you pay for !
Pour 600 €, c'est le prix d'achat, je me dis que c'est finalement ce que ça vaut et que ça vaut le coup de le restaurer, là je vais prendre une décision en connaissance de cause, un choix technologique parfaitement maitrisé.
J'ai travaillé 15 ans à la construction de bateaux en composite, des voiliers de course ou de propriétaire en sandwich nid d'abeille (nomex) carbone prepreg (cuisson sous vide en étuve), j'ai réalisé des pièces complexes pour la F1 (fonds plats Arrows A20), pour l'aéronautique aussi (moules Aibus en carbone par autoclave à Munich), j'ai mis au point des prototypes en carbone pour de riches propriétaires, j'ai réalisé des pièces structurelles diverses, des pièces design, j'ai participé à la construction de plusieurs mâts en carbone monolytique de 35 mètres, j'ai était indépendant et j'ai eu mon entreprise à La Ciotat sur le site des chantiers.
Bref j'ai une belle expérience de Boat Builder, je décide donc à ce moment là de sauver l'Artesien à l'aide de solutions innovantes.
La solution (dans le cas présent) c'est l'époxy associé au verre, à l'aramide (Kevlar) et... au carbone, n'en déplaise aux integristes du bateau bois et autres Augustiniens ;)